« La foi, c’est l’intelligence éclairée par l’amour. » Simone Weil
La foi, en général, est bienfaisante pour tous. Nous en avons besoin dans nos sociétés pour que la confiance et la loyauté règnent dans les échanges. Les racines latines du mot foi, fides, et du verbe croire, credere, expriment l’idée de confiance. On met sa confiance en quelqu’un, en quelque chose; on se confie, on se fie à un autre que soi. Et cela commence très tôt. Le petit enfant s’éveille normalement à la vie d’après la confiance qu’il développe envers sa mère, son père, les personnes qui l’entourent. Comment s’épanouir si on ne croit pas en soi et en les autres, si on ne fait pas confiance? Comment grandir individuellement et collectivement si nous accordons seulement la primauté au pouvoir et au savoir, alors que le « croire » est aussi une dimension importante de notre être?
La foi, disait la philosophe Simone Weil, « c’est l’intelligence éclairée par l’amour ». Elle mobilise tout ce que nous sommes et engage profondément notre existence. C’est un clair obscur qui précède le discours et qui approche le mystère avec sa propre logique. Elle nous fait entrer dans une autre dimension de sens, un axe vertical, comme si on voyait l’invisible. Elle ouvre la porte sur l’infini d’un amour, jusqu’à croire qu’on est aimé éternellement. La foi, qu’elle soit en soi, en l’autre, en Dieu ou dans le Christ, est liberté de l’esprit et ouverture de l’intelligence.
Quinze variations de la foi
Dans mon livre L’aventure de la foi (éd. Parole et Silence), je présente surtout la foi chrétienne comme un acte, un don, une vie, une expérience, une écoute, une réponse, un toucher, un regard, un doute, une nuit, une lumière, un savoir, un combat et un engagement. Croire, c’est accepter que notre vie se joue devant le mystère de Dieu qui nous échappera toujours.
Dans les évangiles, Jésus s’émerveille de la foi de ses interlocuteurs, mais il déplore aussi leur manque de foi. Pour lui, la foi ouvre les portes du salut et fait accéder la personne à son humanité profonde. Ce qui n’enlève pas le doute qui épure notre foi et nous libère des idées toutes faites sur Dieu. Le doute peut aider la foi en la protégeant du fanatisme, de l’arrogance. La foi n’est pas la pensée magique qui se barricade derrière une forteresse de certitudes et de lois, mais une relation de confiance qui tend la main vers l’autre pour mieux l’accueillir et l’aimer.
La joie de croire
La foi est une aventure singulière qui s’enracine dans le quotidien.
Son côté surnaturel la rend suspecte à plusieurs de nos contemporains qui craignent le dogmatisme et le prosélytisme. Il y a ceux qui croient en Dieu et d’autres qui ne croient pas. Des deux côtés, il y a des nuances, des questions, des ombres, souligne le chanteur Gilles Vigneault, dans un livre d’entretiens. Pour lui, « un athée, c’est un croyant qui se repose » (Un pays intérieur, Novalis). Et si Dieu croyait en nous beaucoup plus que nous croyons en lui?
Pour moi, le croyant est un aventurier de l’esprit qui arpente des territoires inconnus. Il ose l’aventure de la foi avec confiance, sans se laisser arrêter, si malaisée que soit la route. La foi devient alors une vie en abondance, un excédent de sens au quotidien, une expérience du sacré dans les réalités de tous les jours, une rencontre de Dieu. L’aventure de la foi devient l’aventure de la joie. Il y a une grande joie à croire, et cela se traduit dans l’engagement.