Nous sommes des femmes en quête d’identité. Qui suis-je? Femme fatale, femme obéissante, femme indépendante, femme d’affaires, maman, femme de tête, pétard, femme folle, femme forte, sensible?
Beaucoup de la quête identitaire des femmes passe par son corps. Fabriquer un corps qui répond aux modèles?
Ou bien, pratiquer des méthodes qui nous mènent à une réelle authenticité?
Une authenticité somatique…
Dans notre société, les centres de conditionnement physique se sont fait une réputation vis-à-vis la recherche du bien-être et le renforcement du sentiment de soi. Le culte du corps tonique est véhiculé par les médias en représentant le succès, la capacité de performance, le plaisir, la jovialité, l’agilité et la sensualité. Le modèle de corps fabriqué dans des centres de conditionnement physique fait écho aux valeurs de productivité, de compétitivité, de performance, de rapidité et d’efficacité.
Les exercices proposés dans les centres de conditionnement physique sont la plupart du temps répétitifs et requièrent l’utilisation de plusieurs parties du corps à la fois. Héritiers des mouvements des ouvriers qui travaillent dans des grandes chaînes de production postrévolution industrielle, ces mouvements entraînent la fixation de certaines connections neuronales. Rapidement le pilote automatique s’installe. Pour remédier à la monotonie, nous lisons un livre pendant que nous montons des escaliers imaginaires; ou on regarde la télé pendant qu’on court sur le tapis roulant. Derrière le rideau : distension musculaire, tendinite, bursite, douleur pour les clients des centres de conditionnement physique qui, happés par les miroirs, n’écoutent pas les signaux du corps. Un mode de vie qui rend utilitaire la relation au corps. C’est une façon de vivre qui est en dette avec le savoir sensoriel inhérent à tout corps de femme.
D’un autre côté, l’authenticité somatique relève d’une intimité envers ses propres processus internes (sensations, sentiments, pensées…) et peut être atteinte par le biais des pratiques somatiques : yoga, tai-chi, danse, antigymnastique, feldenkrais, chi kung, gymnastique holistique, continuum, body-mind centering, etc.
Ces pratiques ont en commun une vaste palette de stratégies pédagogiques dont la scène est le mouvement du corps en tant que territoire à défricher. Réunir corps et esprit. Rendre le corps un lieu de plaisir et non de lutte. À la fois tonique et détendu.
L’authenticité somatique n’est pas contradictoire avec son identité socioculturelle. On aspire à un corps ferme, jeune…
Tel qu’un bol vide, l’authenticité somatique fournit un contenant à l’identité socioculturelle. Sans l’authenticité comme limite, nous ne serions que des masques, que des rôles, que des clans. Nous ne serions qu’appartenance à un groupe et notre singularité serait avortée. La personne s’identifie à 100 % aux rôles qu’elle construit de façon à être fonctionnelle dans son quotidien. Cependant, nous perdons de vue notre unicité.
Lorsqu’une personne se retourne vers son authenticité somatique, elle prend conscience de quelque chose qu’elle possède déjà. Un des marqueurs d’authenticité somatique se manifeste dans les moments où on se trouve beau, belle, en dehors des modèles de beauté véhiculés par les médias.
Nous sommes en même temps relation et singularité. Si nous considérons que le niveau de santé d’un individu est proportionnel au degré de mobilité qu’il peut avoir entre ses multiples rôles quotidiens et son authenticité somatique, nous comprenons pourquoi un mode de vie qui a pour seule valeur la capacité de performance et productivité des individus est voué à l’échec.
L’authenticité somatique est un état de disponibilité où poussent les graines d’une technologie interne. Savoir quoi faire pour s’autoréguler entre ses rôles sociaux et son unicité. Garder son équilibre interne vis-à-vis les demandes de l’environnement. Être authentique, c’est être intègre et apprécier la beauté qui émerge de l’acceptation de soi.